Depuis 2019, la législation mexicaine intègre une loi en faveur de l’économie circulaire. Pour qu’elle soit prise en compte dans la construction routière, différentes dispositions peuvent être mises en œuvre. Les techniques routières contribuant à l’économie circulaire d’ores et déjà utilisées au Mexique sont rappelées dans cet article.
• Mais un effort coordonné au niveau national fait défaut, et un engagement global de l'industrie routière est nécessaire pour réduire l'impact environnemental.
• Le Mexique utilise déjà certaines techniques de construction routière pour soutenir l'économie circulaire, notamment les enrobés tièdes, les enrobés à froid et les chaussées perpétuelles, qui réduisent la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre, tout en prolongeant la durée de vie des routes.
Fin 2019, le Sénat mexicain a adopté le projet de loi sur l’économie circulaire, dont le principal objectif est de veiller à l’existence, dans le pays, d’un cadre réglementaire général qui permette à l’État d’exploiter efficacement et durablement ses ressources naturelles, économiques et humaines tout en facilitant la transition vers un modèle d’économie circulaire. La loi mexicaine sur l’économie circulaire vise ainsi à préserver le plus longtemps possible la valeur des produits, matériaux et ressources dans le cycle économique afin de limiter la production de déchets.
Son article 20 stipule que toute personne dont l’activité consiste en la construction ou la démolition ou produit des déchets considérés comme des déchets de construction, au regard de la loi générale pour la prévention et la gestion intégrale des déchets, doit en valoriser au moins 50 % lorsque l’infrastructure locale le permet.
Le Mexique nécessite une réglementation d’application généralisée, ainsi qu’un engagement unifié de l’industrie routière pour contribuer à l’économie circulaire et réduire son impact environnemental. Malgré les mesures prises individuellement par certaines agences gouvernementales et entreprises privées, il n’existe pas d’effort coordonné au niveau national.
Défis liés à la promotion de l’économie circulaire au Mexique
Les activités nationales actuelles de promotion de l’économie circulaire exigent une coordination. À cette fin, Mauricio Centeno Ortiz considère qu’il convient de :
- maximiser la durabilité des technologies utilisées pour réduire la fréquence des travaux d’entretien ;
- aider les constructeurs qualifiés (équipement et formation) à adopter les bonnes pratiques dans leurs modes opératoires ;
- évaluer et documenter systématiquement tous les processus de construction ;
- améliorer la planification des travaux d’entretien pour garantir des conditions climatiques optimales, employer des technologies vertes et recourir à des entrepreneurs expérimentés afin de prolonger le cycle de vie des chaussées ;
- utiliser des combustibles non fossiles dans les processus de construction et d’entretien ;
- encourager la réparation, le réemploi et le recyclage pour limiter les déchets ;
- dispenser des formations sur les avantages de l’enrobé tiède et de la réutilisation/du recyclage des matériaux ;
- inciter les agences à appliquer des technologies vertes dans les projets de construction et d’entretien des routes ;
- imposer aux services des transports le recours à des technologies écologiques éprouvées, la réalisation de tronçons d’essai et le contrôle de la conformité aux exigences du cahier des charges ;
- élaborer des projets et spécifications fondées sur la performance (en tenant compte de la résilience de l’infrastructure) ;
- obliger les ingénieurs à publier des guides, normes et spécifications qui facilitent l’application des techniques ;
- exiger, de la part du gouvernement, des taux minimum de recyclage dans les projets de construction ;
- promouvoir la planification et la coordination de tous les secteurs impliqués dans les activités de construction ;
- investir, s’agissant des entrepreneurs, en fonction des exigences des services des transport ;
- mettre en place des incitations légales aux projets favorisant l’économie circulaire ;
- employer des techniques d’enrobage plus respectueuses de l’environnement que les classiques enrobés à chaud, comme les enrobés tièdes, les enrobés à froid et le bitume-mousse.
Techniques contribuant à l’économie circulaire
et réduisant l’impact environnemental
Quelques initiatives isolées en faveur de l’économie circulaire et de la décarbonation ont été menées jusqu’à présent au Mexique.
Enrobés à chaud avec AE
Avec un pourcentage de matériaux recyclés inférieur à 30 %, les enrobés conservent globalement leurs propriétés mécaniques (photo 1).
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Avantages de l’utilisation d’agrégats d’enrobés (AE) dans les enrobés à chaud :
- Le réemploi du bitume et des granulats limite l’épuisement des ressources naturelles.
- Le recyclage permet de réaliser d’importantes économies d’énergie et d’entretien, ce qui augmente la part des budgets consacrée aux routes.
- La réduction des émissions de gaz à effet de serre diminue l’effet de serre et la nocivité de l’environnement de travail pour les applicateurs.
Enrobés tièdes avec ou AE
Les enrobés tièdes (photo 2) sont produits à partir de substances comme les cires ou les paraffines, qui modifient la viscosité du bitume à moyenne température.
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Avantages de l’utilisation des enrobés tièdes :
- réduction des températures de mélange et de compactage (de 30 à 50 °C) ;
- température de fabrication inférieure limitant le vieillissement de l’enrobé pendant la production et donc sa propension à la fatigue et à la fissuration ;
- baisse de la consommation d’énergie (selon la température et le type de combustible) de l’ordre de 20 à 30 % ;
- réduction significative des émissions de GES.
Chaussées « perpétuelles »
Ces chaussées emploient des matériaux dont les caractéristiques mécaniques sont supérieures à celles des chaussées classiques rencontrées au Mexique. À ce jour, au moins 7 projets emploient cette technique (figure 1).
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Avantages des chaussées « perpétuelles » sur les chaussées classiques :
- Elles affichent un cycle de vie allongé (durée de vie >20 ans).
- Elles évitent les remises en état ou reconstructions structurelles majeures sur de courtes périodes (environ 5 ans).
- Leur entretien se limite au remplacement de la couche d’usure.
Enrobés à froid
Les enrobés à froid sont produits à température ambiante avec des émulsions de bitume. Ils sont généralement utilisés pour les traitements d’entretien de surface, voire pour les reconstructions (photos 3).
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Les enrobés à froid utilisés pour les traitements de surface au Mexique sont les enduits superficiels (chip seal), les enduits superficiels avec fibres de verre, les coulis bitumineux « cape seal » et « scrub seal ». Dans le cadre de reconstructions, les enrobés à l’émulsion permettent la remise en état en profondeur des chaussées bitumineuses. Le bitume-mousse est également employé pour l’élaboration de couches d’assise.
Avantages de l’utilisation d’enrobés à l’émulsion pour les traitements de surface :
- recours à des émulsions de bitume à faible impact environnemental et plus économes en énergie ;
- potentiel d’amélioration de 3 à 6 ans ;
- faible consommation de matériaux (granulats et bitume) ;
- rapidité des travaux et donc faible impact sur la circulation ;
- différents choix de granularité.
Enrobés tièdes à Mexico
Depuis 2010, un décret gouvernemental impose l’application d’enrobés tièdes dans toutes les activités de revêtement, de resurfaçage et de réparation localisée de la ville de Mexico. La température de production de ces enrobés doit être comprise entre 120 et 151 °C.
L’usine d’enrobés de la ville de Mexico a ainsi été contrainte de fabriquer exclusivement ce type d’enrobé. Elle en produit 800 000 t par an, soit 75 % du volume total d’enrobés que cette la ville utilise.
Mexico est actuellement la seule ville du pays à exiger l’emploi d’enrobés tièdes.
Conclusion
Il reste encore beaucoup à faire pour que l’industrie mexicaine des chaussées bitumineuses passe à un modèle d’économie circulaire, mais les premières étapes ont été franchies et il convient de poursuivre sur cette voie, voire d’accélérer le pas pour que, dans moins de 10 ans, le Mexique puisse afficher un taux élevé d’économie circulaire dans son industrie.