Les JTR 2020, qui se sont tenues à Nantes les 5 et 6 février, se sont caractérisées, comme habituellement, par une large palette de sujets concernant les infrastructures (attendus et progrès pour la sécurité, évolution des bitumes et de leur caractérisation, endommagement des chaussées : programme DVDC, infrastructures ferroviaires et urbaines). Des aspects plus prospectifs ont fait l’objet d’échanges dans les deux ateliers consacrés à l’adaptabilité et aux nouveaux concepts d’évaluation des infrastructures. Le concours des thèses, désormais bien installé, aide à tisser des liens entre les doctorants et les professionnels.
Depuis plus de 25 ans, les Journées techniques Route – ou JTR – réunissent les acteurs publics et privés de la construction, de l’entretien, de la surveillance, de la sécurité et de l’exploitation des routes, des pistes aéronautiques, des voies ferroviaires et des platesformes industrielles. Ces journées sont organisées par l’Ifsttar (Université Gustave Eiffel depuis le 1er janvier 2020) à la Cité des congrès en partenariat avec le Cerema et l’Idrrim.
Ces journées techniques s’adressent à un large public et plus précisément aux chercheurs et techniciens des secteurs privé et public, qu’ils proviennent de laboratoires, de collectivités ou d’entreprises, afin de diffuser des résultats de recherche, d’étude et d’expertise en vue d’entretenir une communauté technique française de bon niveau. Même si le public est principalement constitué d’habitués, le brassage d’idées est réel et il présente un intérêt fort pour le transfert et le développement d’innovations et d’expérimentations en partenariat. Avec un contenu technique en phase avec les évolutions du domaine, cette manifestation se positionne à mi-chemin entre une conférence scientifique dans le domaine routier (EATA, SURF, ISAP, etc.) et le congrès de l’Idrrim, qui vise à porter un message technique vers les décideurs. Son positionnement est comparable à celui du congrès TRA (Transport Research Arena) au niveau européen. Il permet des échanges croisés entre les techniciens et les experts de façon à favoriser l’enrichissement des pratiques par la recherche (et vice versa) sur des problématiques clés du secteur des infrastructures.
Ainsi, cette manifestation contribue à la diffusion des techniques routières, ferroviaires et aéroportuaires et à leur évolution en tenant compte des avis des donneurs d’ordre (État, ministère, régions, collectivités locales) et des possibilités des entreprises.
SESSION TRANSVERSALE : SUJETS D’ACTUALITÉ ET DE STRUCTURATION DU PAYSAGE
Les trois co-organisateurs des JTR : l’université Gustave Eiffel (UGE), le Cerema et l’Idrrim (photo 1) sont venus présenter à l’audience un sujet structurant pour certains ou un bilan pour d’autres.
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Les représentants des organismes co-organisateurs des JTR (de gauche à droite) : Hélène Jacquot-Guimbal (Université Gustave Eiffel), David Zambon (Idrrim) et Pascal Berteaud (Cerema).UGE
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Missions et organisation de l’université Gustrave Eiffel (UGE)
Hélène Jacquot-Guimbal, présidente par intérim de l’UGE, a rappelé le projet scientifique de la nouvelle université : préparer la transformation et l’adaptation soutenable des villes et des territoires, notamment dans les domaines de l’économie des ressources, de la sécurité et de la résilience et de la ville numérique et connectée. L’UGE concentre un quart de la recherche et du développement national sur la ville durable et les transports. Ses missions d’élaboration et de diffusion des connaissances sont au cœur de l’action publique.
• 4 établissements-composantes de formation, 7 UFR (unités de formation et de recherche), 5 instituts
• 23 composantes de recherches
• 17 000 étudiant(e)s
• 2 300personnels
L’université créée est atypique puisqu’elle regroupe un organisme de recherche, une université et trois écoles d’ingénieurs. Elle vise à répondre à 5 enjeux clés : la recherche, la formation, la vie étudiante et de campus, les relations internationales, la valorisation et les relations socio-économiques. Pour cela, elle possède 4 atouts : un niveau très élevé d’interdisciplinarité, une approche multi-échelles, un dispositif unique d’équipements et de plates-formes, la co-innovation avec les partenaires socio-économiques. Ses spécificités font d’elle la première université française en matière d’apprentissage, une université nationale avec plusieurs campus en province (Lyon, Lille, Nantes...), une université citoyenne avec des contrats d’objectifs, des accords avec le RST (réseau scientifique et technique), mettant en avant son action en appui aux politiques publiques et avec de fortes relations socio-économiques.
Challenges à venir pour le Cerema
Pascal Berteaud, directeur général du Cerema, a rappelé le rôle de l’établissement pour opérer un changement de posture en évoquant une nouvelle approche de la gestion patrimoniale, résiliente et systémique. L’année 2020 verra également le lancement du label national 2EC, qui vise à valoriser les bonnes pratiques de la profession en matière de prévention et de gestion des déchets.
La dimension écologique n’est pas la seule transition à laquelle la route doit faire face ; les nouveaux usages et les exigences sociétales remettent également en question notre vision de l’infrastructure.
L’Idrrim : bilan 2019 et les perspectives 2020
Comme chaque année, la session d’ouverture des JTR est l’occasion de faire un bilan des travaux conduits au sein de l’Idrrim pendant l’année écoulée et de présenter les actions engagées, ce qu’a fait David Zambon, directeur général de l’Idrrim.
L’année 2019 a été particulièrement marquée par la conduite d’une réflexion stratégique sur l’avenir de l’Idrrim, dans la perspective de ses 10 ans d’existence1, traduite par l’approbation d’une « Feuille de route 2019-2025 »2. Ce cadre stratégique s’est notamment poursuivi par un réexamen des programmes d’action de chaque instance de travail de l’Idrrim et la préparation d’un « Pacte d’engagement des acteurs des infrastructures de mobilité » destiné à prendre la suite de la Convention d’engagement volontaire de 2009. Un panorama des nouvelles publications, dorénavant disponible dans un Catalogue des publications Idrrim3, et la présentation des principaux résultats du Rapport 2019 de l’Observatoire national de la route4-5 (ONR) ont complété cette présentation. Rendez-vous est enfin donné à tous pour le Congrès de l’Idrrim6 les 29 et 30 septembre 2020 à Rennes, sur le thème « Citoyens, professionnels, décideurs : face aux transitions, quel engagement collectif pour les infrastructures de mobilité ? ».
Projets et liens du Fehrl avec les JTR
Le secrétaire général du Fehrl (Forum européen des laboratoires de recherche routière), Thierry Goger, est venu parler des attendus de l’Europe. Il a d’emblée positionné les défis de la route du futur, qui doit faire mieux avec moins ! Son propos s’est intéressé à quatre enjeux majeurs de la mobilité durable : être plus économe et moins énergivore, répondre aux attentes de l’Europe dans le cadre des appels d’Horizon Europe (2021-2027), développer l’innovation et rester à l’avant-garde en matière de métiers et de compétence :
- Les attentes de l’Europe à l’échéance de 2050 sont de réduire de 65 % les émissions de CO2, de ne compter aucun accident mortel sur les chantiers, de transformer 50 % des trajets routiers de moyenne distance entre villes en trajets ferroviaires, de réduire de 50 % le tonnage/km du fret.
- Les appels d’Horizon Europe laissent une large place à l’adaptation au changement climatique, incluant les transformations sociétales, notamment pour les villes, qui doivent tendre vers une neutralité climatique.
- Le « greening » devient ainsi le mot clé de l’innovation.
- La majorité des métiers du transport routier en 2035 sont à développer.
Projet RRN 20-30
Jean-Renaud Gély, directeur adjoint de la direction des Infrastructures de transport (DIT) a présenté le projet « RRN 20-30 – Ensemble pour la route de demain », dont l’ambition, dans un contexte très contraint, est de définir la stratégie du réseau routier national (RRN) et de clarifier les missions stratégiques et opérationnelles de l’État.
Cette démarche, centrée sur quatre bénéficiaires – les usagers, les agents, le patrimoine et les territoires – a pour principal objectif d’identifier les missions de l’État stratège (garant de l’intérêt général, régulateur, anticipateur, financeur, chef d’orchestre) ou opérateur (gestionnaire du RRN – missions, optimisation des processus, modèle économique – et garant d’une information routière fiable) tout en renforçant le pilotage et le dialogue de gestion.
Fort d’une nouvelle vision stratégique pour le RRN, la DIT a lancé les premiers groupes de travail et vise un rapport qui définira l’ambition du projet, ses principes directeurs, ses modalités de mise en œuvre et le calendrier de référence.
J.-R. Gély a ensuite présenté les travaux en cours sur la doctrine technique routière qui visent à répondre aux attentes des utilisateurs en améliorant et opérationnalisant sa gouvernance.
BRÈVES
Plusieurs communications ont été faites au cours de cette séance :
- Présentation du nouveau guide sur le bruit de roulement, rédigé par le sous-groupe Bruit du GNCDS (groupe national Caractéristiques de surface de chaussées), dont l’objectif est d’informer les maîtres d’ouvrage et gestionnaires de réseaux de l’état de la connaissance et de la pratique sur les méthodes de mesure du bruit de roulement, les performances acoustiques des revêtements de chaussée et leur évolution dans le temps.
- Annonce de la diffusion du Manuel de dimensionnement des chaussées neuves à faible trafic (photo 2), fruit du groupe de travail sous l’égide de l’Iddrim et piloté par François Chaignon, associant l’ADF, le Cerema, Cimbéton, Eurobitume France, l’Idrrim, l’Ifsttar, Routes de France, Syntec Ingénierie, l’Unicem. Le document se veut autant que possible autoporteur, conforme à la méthode de dimensionnement des chaussées neuves, qui intègre les matériaux sub-normaux et les déchets tout en valorisant les sols supports.
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- Bilan de l’activité technique du cycle PIARC 2016-2019, durant lequel on constate un regain d’intérêt pour la route, élément majeur de la solution de mobilité et support pour de nombreuses innovations. Les travaux de l’association s’inscrivent dans un contexte exceptionnel avec la volonté de reconstruire, de réadapter l’existant et de moderniser nos actifs (énergie, logement, transports) dans des sociétés de plus en plus fracturées et complexes.
- Avancées technologiques en matière de contrôle sanction automatisé des surcharges des poids lourds. Les surcharges sont dangereuses pour les infrastructures, la sécurité routière et biaisent la concurrence (modale et interentreprises). Pour limiter ces surcharges, les contrôles sont nécessaires et le contrôle sanction automatisé (CSA) semble la seule voie pour les rendre efficaces et dissuasifs compte tenu des flux de poids lourds et moyens actuels. La direction générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer (DGITM) a lancé un projet piloté par l’UGE, associant le Cerema, pour valider la faisabilité du CSA surcharges et préparer, en lien avec la métrologie légale, une procédure d’homologation de modèles d’équipement de pesage en marche adaptés (photo 3). L’objectif est une mise en œuvre à partir de 2021-22.
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- Progrès réalisés sur la caractérisation des matériaux afin d’évaluer la tenue à l’eau résiduelle d’une chaussée avec travaux de rechargement. Ces travaux ont été menés dans le cadre d’un partenariat Eurovia-Ingevity-Ifsttar considérant la problématique de l’adhésivité liant-granulat. Sur la base d’un ensemble de granulats de différentes pétrographies, il a été observé que le suivi du module de l’enrobé avec immersion à 60 °C permet de mieux discriminer les couples bitumes/granulats et bitumes + additifs/granulats.
- Approche méthodologique pour étudier l’excavabilité à la pioche des matériaux traités au liant hydraulique7. Ce travail vise à répondre à un des besoins des fournisseurs de réseaux de gaz : accéder rapidement aux réseaux en cas d’urgence tout en évitant d’endommager les canalisations pendant les interventions d’entretien. Le travail de recherche propose un essai de poinçonnement comme moyen de prédiction de l’enfoncement d’une pioche.
- Comparatif des caractéristiques mécaniques (module de rigidité et résistance à la fatigue) des matériaux bitumineux mesurées en laboratoire avec celles mesurées sur chantier. Ce travail s’est appuyé sur une base constituée, sous l’impulsion de Routes de France, de 41 formules et 46 cas de comparaison chantier/ laboratoire provenant des entreprises, complétée par des résultats issus du projet Mure (Multirecyclage des enrobés).
- Présentation de la note d’information Idrrim sur l’étalonnage des matériels de mise en œuvre des matériaux bitumineux coulés à froid (MBCF). Cette méthode prend en compte à la fois les tolérances fondées sur des critères matériels pour les constituants ayant une influence sur la processabilité du MBCF et celles fondées sur les débits granulats et émulsion pour garantir les engagements de l’applicateur (taux d’épandage et teneur en liant résiduel).
SESSIONS TECHNIQUES
Aménagements pour la sécurité routière
Animateurs : F. Vienne (UGE), E. Violette (Cerema), M. Langlet (DGITM/DIT)
Dans l’analyse multifactorielle des accidents de la route, on distingue systématiquement trois principaux facteurs, en proportions variables : ceux relatifs aux usagers, ceux relatifs aux véhicules et ceux relatifs à l’infrastructure. Par la conception, les aménagements et l’entretien de leur réseau, les gestionnaires de routes jouent un rôle déterminant dans la sécurité des déplacements. Cette session s’est donc focalisée sur l’infrastructure, en tenant compte cependant des usagers et des véhicules, avec trois objectifs :
- montrer que les aménagements sont efficaces quand ils impliquent des modifications de comportements des usagers ;
- illustrer cette efficacité par des aménagements récents ayant fait la preuve de leur apport en sécurité routière ;
- s’assurer de la compatibilité entre sécurité, aménagements et circulation.
Les deux premiers intervenants ont abordé le diagnostic, préalable indispensable à l’étude et à la mise en œuvre de solutions. Martin de Wissocq (DGITM) a commencé par une information sur la nouvelle directive européenne sur la sécurité des infrastructures, qui doit être transposée en droit français dans un périmètre et selon des méthodes restant à définir. Franck Noack (SNCF Réseau) a ensuite rendu compte des résultats intéressants obtenus sur la sécurisation des passages à niveau en intégrant les facteurs humains pour tendre vers des comportements adaptés des usagers.
Les deux interventions suivantes ont porté sur des solutions éprouvées d’aménagements routiers intégrant le comportement des usagers. Marie Ripoche-Mballa (Cerema) a d’abord présenté la démarche « Route autrement pour une conduite adaptée » (RACA), qui vise à susciter des comportements sûrs par la conception, ponctuellement ou le long d’itinéraires (figure 1). Philippe Chauvin (CD 76) a ensuite décrit le concept de « Route plus sûre, route sans accident » et sa déclinaison, avec des résultats très positifs, sur un axe majeur de la Seine-Maritime.
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Les deux dernières interventions étaient consacrées aux contributions de la recherche et de l’innovation. Régis Lobjois (UGE) a présenté une série d’expérimentations sur simulateur de conduite pour étudier l’influence du profil en travers de routes bidirectionnelles sur le comportement de conduite (projets FSR Profil et DSR Profil+). Éric Violette (Cerema) a évoqué les perspectives d’un projet qui vise à croiser des données de différentes natures et origines en vue d’identifier des sections routières à risque (DSR SécuBidi).
La session a mis en exergue la convergence des acteurs (État, collectivités, gestionnaires, tiers tels que SNCF Réseau et industriels) dans l’amélioration des infrastructures au regard de la sécurité routière.
Le continuum entre réglementation, normalisation, certification et règles de l’art est essentiel pour asseoir les pratiques sur des bases scientifiques et pour partager les principes de simplicité et de lisibilité des aménagements et des équipements du réseau français. Deux cas sont cités en exemples : les dispositifs d’alerte sonore permanents introduits suite au projet ANR Roadsense et la révision des pratiques pour la sécurité sur les zones d’intervention sur chaussée suite à l’opération « Assez » de la DIT.
La session a montré que les caractéristiques intrinsèques ne suffisent pas pour qualifier les infrastructures. Les travaux du Cerema et de l’université Gustave Eiffel aident à mieux comprendre le lien entre les caractéristiques de l’infrastructure et le comportement de l’usager. Ils alimentent la réflexion sur la création, l’évaluation et l’évolution des outils et guides méthodologiques pour les concepteurs et les gestionnaires et orientent les innovations tant en matière d’aménagements que d’équipements de la route.
Le bitume : enjeux et nouveautés
Animateurs : V. Gaudefroy (UGE), V. Mouillet (Cerema), J.-M. Michou (Eurobitume)
Produits bitumineux en France : bilan 2018
Christine Leroy (Routes de France) a indiqué qu’après une baisse significative (-34 %) de la consommation française de bitumes, suite au pic de 2007 (env. 3,5 Mt), celle-ci repartait sur une tendance légèrement haussière depuis 2015 (env. 100 KT/an) pour s’établir à 2,7-2,8 Mt en 2018 (figure 2).
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Dans l’intervalle, l’outil de raffinage s’est profondément restructuré, avec la fermeture de plusieurs unités qui produisaient du bitume. Parallèlement, la hausse de la consommation est bien corrélée avec la bonne tenue de l’activité routière, à laquelle le bitume est très majoritairement destiné (> 90 %), dont un tiers pour produire des émulsions destinées aux revêtements superficiels.
L’industrie routière a rencontré, au cours des deux dernières années, des difficultés d’approvisionnement, notamment au moment du pic de consommation. Ces difficultés ont été aggravées par des incidents sur l’outil de raffinage dans plusieurs pays d’Europe. Une voie d’amélioration identifiée consisterait à mieux étaler la commande publique et à prolonger la période des travaux et des créneaux de chargement en raffinerie, afin de réduire l’effet pénalisant de la saisonnalité.
Concernant l’aspect sanitaire, une nouvelle méthode de mesure globale de l’exposition des équipes de mise en œuvre d’enrobés, mise au point par l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité), la CNAM (Caisse nationale d’assurance maladie), les médecins du travail et la profession, a été validée sur chantiers avec deux campagnes en 2014 et 2015.
Afin de limiter l’exposition professionnelle, la profession s’est engagée en 2012 à ce que tous les finisseurs neufs soient équipés de systèmes de captage des fumées d’enrobés bitumineux, de pare-brises et de canopies pour protéger les conducteurs des fumées (gaz d’échappement du moteur et fumées d’enrobés bitumineux). La nouvelle version de la norme des finisseurs (ISO 20500-5) intègre la description des dispositifs de captage et la méthode de mesure de l’efficacité des captages.
Évolution de la production et des besoins en hydrocarbures
Franck Chevallier (Ufip – Union française des industries pétrolières) a rappelé le rôle majeur du raffinage français dans la production de bitume, qui a suivi la consommation sans découplage au cours des dernières années et a augmenté sa part relative entre 2012 et 2020. L’évolution de la réglementation de l’Organisation maritime internationale, qui impose au niveau mondial une baisse de la teneur en soufre limite (de 3,5 % à 0,5 %) dans les carburants marins, a ensuite été présentée.
Les raffineurs se sont adaptés en vue de cette échéance 2020 pour répondre à leurs clients. Concernant les liants bitumineux, les bruts de bitume sont pour la plupart à haute teneur en soufre et la teneur en soufre des bitumes ne devrait pas être affectée par cette nouvelle réglementation. Les bitumes et leurs bases de formulation sont produits en raffinerie à partir de bruts spécifiques et sélectionnés (10 à 15 % des pétroles bruts sont aujourd’hui homologués). Les formulations des bitumes pourraient évoluer localement et à la marge, avec de nouvelles bases rendues disponibles, mais devront respecter les normes européennes (EN 12591, EN 14023,...).
Enfin, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la demande des produits pétroliers à usage non énergétiques comme le bitume devrait se maintenir au-delà de 2030.
Développement des essais rhéologiques pour caractériser les liants
Laurence Lapalu (Total – Eurobitume) est intervenue sur l’introduction des essais rhéologiques dans le cadre de la révision de la norme EN 12591 relative aux spécifications des bitumes purs. Il s’agit de mesures à basse température après vieillissement selon les essais normalisés RTFOT et PAV, au moyen de l’essai au BBR (EN 14771), et de la détermination de températures d’iso-module, à partir de mesures de modules complexes de bitumes après RTFOT, au moyen de l’essai au DSR (EN 14770).
Afin d’évaluer le niveau d’appropriation de ces essais par les laboratoires et de déterminer des valeurs de fidélité, des essais croisés ont été organisés par le Bureau de normalisation du pétrole (BN Pétrole) et sponsorisés par Eurobitume, Routes de France et le Cerema. Un premier essai a été organisé en 2017 au niveau français (16 laboratoires inscrits) sur un bitume de grade 50/70, puis un second en 2018, ouvert à l’ensemble des laboratoires européens (42 laboratoires inscrits) sur un bitume de grade 20/30. L’analyse statistique a mis en évidence un bon niveau de maîtrise des laboratoires, puisque très peu d’entre eux ont été exclus de l’analyse, ainsi que des valeurs de reproductibilité très satisfaisantes (de l’ordre de 2 à 3 °C).
Quelques laboratoires ont mentionné des améliorations à apporter à la norme de mesure du module complexe au DSR (EN 14770). Ces éléments ont été transmis au TC336/WG1/TG12, en charge de la révision de cette norme.
Utilisation des outils rhéologiques dans le cadre du développement des liants
Comme l’a rappelé Lionel Jungmann (Shell), une des activités du Centre technique européen de Shell Bitumes, basé à Illkirch, vise à déterminer, en utilisant ses équipements rhéologiques, le meilleur liant « frais », en fonction de la qualité des agrégats d’enrobés (AE), pour le développement de solutions enrobés incorporant des recyclés.
La méthodologie d’étude mise en place consiste à extraire le liant des AE, puis à mesurer sa consistance et ses propriétés rhéologiques pour affiner la sélection des liants frais potentiellement utilisables. Ensuite, des mélanges incorporant le liant récupéré des AE, selon une teneur dépendant du taux de recyclage demandé par le client, sont réalisés. Ces mélanges seront également caractérisés par des essais rhéologiques avant et après vieillissement pour choisir le liant frais ayant la meilleure adéquation avec le liant d’AE.
Approche méthodologique pour le recyclage des enrobés à chaud à fort taux
Le développement des enrobés à fort taux se heurte souvent à des inquiétudes des clients sur la durabilité des enrobés, l’impact d’une mauvaise remobilisation des liants (liant d’apport/liant de l’agrégat), la limite des essais sur les enrobés, qui ne prennent pas en compte d’étape de vieillissement...
Après avoir rappelé la limite des essais conventionnels sur le liant (pénétrabilité par exemple) pour prédire le module de rigidité d’un enrobé, Frédéric Delfosse (Eurovia) a présenté une nouvelle approche méthodologique pour la formulation d’enrobés bitumineux à chaud à fort taux d’agrégats d’enrobés (AE).
Cette méthodologie s’appuie, dans un premier temps, sur l’analyse des propriétés d’un liant « homogène » entre le liant d’apport, le liant de l’AE et l’ajout d’un éventuel régénérant. Ces essais permettront d’évaluer plus spécifiquement la susceptibilité au vieillissement du liant vis-à-vis du comportement à basse température ainsi que les propriétés rhéologiques du liant pour prédire le module et la fatigue de l’enrobé. Dans un second temps, les enrobés seront analysés après la qualification de la remobilisation des liants selon les essais normalisés. Une réflexion sur un essai à basse température après vieillissement des enrobés semble pertinente.
Recytal®-ARM : retraitement en place à l’émulsion de liant biosourcé
Le procédé Recytal-ARM de retraitement en place à l’émulsion de liant biosourcé (photo 4) a été présenté par Lionel Odie (Cerema) et Frédéric Loup (Eiffage Infrastructures). Ce procédé a été proposé par la société Eiffage, qui a été lauréate en 2017 de l’appel à projets du Comité Innovation Routes et Rues (CIRR). Ce dispositif, porté par la DIT, vise à soutenir des projets innovants en les faisant bénéficier d’une expérimentation in situ suivie par les équipes du Cerema. Dans ce contexte, les conseils départementaux de la Gironde et de l’Hérault ont souhaité expérimenter le procédé Recytal-ARM dans le cadre du programme d’entretien de leur patrimoine routier.
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Deux chantiers d’envergure ont donc été réalisés en juillet 2018 sur les routes départementales de la Gironde (RD 670) et de l’Hérault (RD 26). Leur bilan à un an a permis de faire un point sur l’intérêt environnemental du procédé ainsi que sur les performances techniques obtenues :
- En laboratoire, le liant bio-sourcé Recytal se distingue par sa réactivité et une consistance atypique par rapport à celle du liant bitumineux utilisé en référence.
- Sur le terrain, le comportement du retraitement Recytal-ARM est satisfaisant et comparable, à cette échéance de jeune âge, au comportement d’un retraitement en place « classique » (réalisé à l’émulsion de bitume), notamment en termes d’amélioration du niveau de déflexion du support. Le suivi du comportement du procédé sera consolidé sur une période minimale de 3 ans pour pouvoir rédiger un certificat de bonne fin.
Endommagement et durée de vie résiduelle des chaussées
Animateurs : M.L. Nguyen (UGE), H. Odéon (Cerema), C. Leroy (Routes de France)
Après une présentation synthétique des objectifs et des trois thèmes de travail du projet national Durée de vie des chaussées (DVDC)8-11, la session a porté un éclairage sur une sélection de sujets précis en liaison avec chacun des thèmes. Elle s’est terminée par une ouverture sur le projet en cours ANR SolDuGri de renforcement des chaussées avec des grilles en fibre de verre12-13.
Le projet national DVDC
Brice Delaporte (Routes de France) a ouvert la session en présentant, au nom de l’Irex, administrateur du projet, le contexte et l’organisation du projet national DVDC, courant sur la période 2016-2021 et regroupant une quarantaine de partenaires. Les travaux visent à mieux comprendre les mécanismes d’endommagement des chaussées existantes (thème 1), à partir d’une meilleure évaluation de l’état du réseau (thème 2), afin de mieux prédire la durée de vie résiduelle des chaussées en s’appuyant sur des modèles contribuant à bien comprendre le comportement des matériaux et des structures sous charge (thème 3).
Jean-Pierre Marchand (Route et Conseil) a présenté, à titre d’illustration des travaux du thème 1, les résultats issus de deux enquêtes successives menées auprès des gestionnaires de réseaux routiers départementaux afin d’évaluer les pratiques et d’identifier les problématiques actuelles. Parmi les nombreuses informations collectées, il apparaît que :
- La part structurante d’un réseau départemental représente en moyenne 30 % du linéaire total.
- On trouve un giratoire tous les 18 km en moyenne (hors agglomération).
- Le coût moyen de l’entretien routier est compris entre 0,35 et 0,44 €/m2 par an et la période de renouvellement moyenne est de 15 ans environ. Sébastien Wasner (Cerema) et Mai-Lan Nguyen (UGE) ont illustré les travaux menés dans le cadre du thème 2.
Les méthodes et outils d’auscultation des chaussées connaissent une évolution considérable, marquant une rupture technologique des matériels et nécessitant une adaptation conséquente des pratiques. De nouveaux matériels d’acquisition sont désormais disponibles, permettant d’acquérir rapidement des données en grand nombre, et les méthodes d’auscultation doivent s’adapter pour fournir, en fonction du réseau ausculté, le meilleur rapport entre finesse d’auscultation, périodicité et choix des indicateurs.
D’autres moyens d’auscultation déjà connus peuvent être mieux utilisés. C’est notamment le cas du déflectomètre à masse tombante (FWD). Une campagne d’auscultation a été menée sur des structures du manège de fatigue de l’UGE, visant à évaluer la cohérence de ces essais de déformabilité entre différents appareils FWD et à améliorer les modèles de prédiction du comportement des chaussées, valorisable dans le cadre de la méthode française de dimensionnement des chaussées. Ses résultats ont été présentés.
Le thème 3 de DVDC a été illustré par les travaux conduits par Tristan Lorino (UGE), décrivant un modèle statistique d’évolution des caractéristiques de chaussées (figure 3). Il s’agit, pour chaque indicateur de l’état d’une chaussée, de rechercher un modèle susceptible de décrire son évolution dans le temps. Le modèle logistique est calé à partir de données relevées sur un réseau routier, intégrant comportement moyen et spécificités de chaque section à travers sa variabilité (allant croissant dans le temps en fonction du trafic cumulé).
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Simon Pouget (Eiffage Routes), co-pilote du projet DVDC, a conclu cette première partie en indiquant que les travaux de DVDC se poursuivaient. Il a choisi d’illustrer ces travaux en évoquant les quatre thèses actuellement en cours à l’UGE, à l’ENTPE, à l’Université de Limoges et à l’INSA de Strasbourg.
Le projet ANR SolDuGri
Cyrille Chazallon (INSA Strasbourg) a rendu compte des travaux menés dans le cadre du projet ANR SolDuGri, qui concerne le renforcement des chaussées bitumineuses avec grilles enduites.
Débuté en janvier 2015 pour une durée de 5 ans, associant six partenaires dont INSA Strasbourg (laboratoire ICUBE), UGE, Colas, Epsilon et 6D Solutions, le projet comporte six tâches (état de l’art, étude des matériaux en laboratoire, essais en vraie grandeur, modélisation, évaluation durable des solutions, diffusion et dissémination) qui ont chacune fait l’objet d’une illustration.
Après une caractérisation en laboratoire des performances des différentes grilles, des essais in situ et sur le manège de fatigue ont été réalisés. Des modèles ont été développés afin d’évaluer l’apport de la grille dans une structure. Enfin, une étude ACV (analyse du cycle de vie) a été menée pour apprécier l’impact de cette technique sur la durée de vie de la chaussée et sur l’environnement. Une journée de restitution du projet est programmée le 26 novembre 2020.
Infrastructures pour transports guidés
Animateurs : T. Gabet (UGE), C. Sautel (Cerema), N. Calon (SNCF Réseau)
La nouvelle voie de tramway nantaise
La Société d’économie mixte des transports en commun de l’agglomération nantaise (Semitan), qui gère le réseau de tramways nantais, dispose d’un laboratoire et d’un centre d’expérimentations pour la conception de lignes de tramways innovantes.
La nouvelle voie de tramway nantaise est un projet de 750 mètres linéaires de plate-forme tramway à rénover, en plus de deux stations. L’une des caractéristiques de cette nouvelle conception est d’être compatible avec tous les types de revêtements : herbe, dalle, pavé, béton, enrobé, ballast...
En cette ère de rénovation des réseaux, il apparaît nécessaire d’intégrer les retours d’expérience pour standardiser les pratiques et assurer une maintenance aisée à long terme, tout en prenant en compte le contexte urbain et les contraintes d’exploitation du tramway.
La mise en service de la plate-forme en septembre 2018 (photo 5) a montré l’efficience de ce projet avec la nouvelle approche.
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Besoins et perspectives de SNCF Réseau sur les petites lignes
Force est de constater que les lignes de desserte fine du territoire LDFT vieillissent, malgré les efforts significatifs consentis ces dernières années. Il faut en effet toujours améliorer la qualité de service, dans un contexte contraint budgétairement.
Face à la diversité des usages de ces LDFT, il ne peut y avoir une réponse standard, mais plutôt un ensemble de réponses adaptées aux différents projets. Pour cela, SNCF Réseau développe une approche nouvelle et partenariale, qui favorise des choix concertés entre tous les acteurs et repose sur trois grands piliers :
- un dialogue avec les utilisateurs, et en premier lieu les Régions, pour répondre aux besoins et aux fonctionnalités de la ligne ;
- un catalogue de solutions des différents constituants de l’Infrastructure afin de définir la solution technique la plus appropriée ;
- un engagement dans la durée de SNCF Réseau et des autres acteurs, sur la base de la solution retenue.
Une voie ferrée innovante sur enrobés bitumineux
Le projet REVES (Réduction de l’épaisseur des voies sous exploitation en souterrain) a pour objectif de trouver une alternative économiquement viable pour la rénovation des tunnels ferroviaires et le déploiement des autoroutes ferroviaires européennes. L’idée principale consiste à abaisser le niveau vertical des rails, en réduisant l’épaisseur de la structure ferroviaire.
La solution technique envisagée élimine le ballast et les traverses et propose de poser les rails en appui continu sur une couche d’enrobés bitumineux. Deux concepts de voies ferroviaires seront testés en laboratoire, à l’aide d’un dispositif de sollicitation Sysife, afin d’identifier le comportement dynamique et la tenue à la fatigue. À la fin du projet, un démonstrateur doit être réalisé.
Engin Surveille pour la surveillance de la voie
Le dispositif Surveille, dédié à la surveillance des voies ferrées, peut notamment contrôler de manière automatisée la superstructure de la voie (attaches, boulons, éclisses, géométrie de la voie, hauteur de ballast, etc.). Le dispositif est géré par un équipage de deux personnes.
Mis en exploitation en 2014, le système a aujourd’hui atteint un haut niveau de fiabilité qui laisse envisager une automatisation à 100 % de la surveillance. Cet engin constitue un atout majeur pour la surveillance du patrimoine ferroviaire.
Système Diatram pour la gestion du patrimoine des transports en commun
Diatram est une solution dédiée aux gestionnaires de réseaux de transport en commun (bus, tramway, etc.) qui permet de constituer une banque d’images géolocalisées et localisées en abscisse. Ces données peuvent ensuite être exploitées par le gestionnaire du réseau via l’application IREVE grâce à laquelle les agents de ses services peuvent accéder, depuis leur bureau, à des informations techniques sur les différentes lignes en exploitation, faire des mesures dimensionnelles dans le plan des voies, réaliser des exports pour d’autres types de traitement. Ils peuvent ainsi assurer la continuité de l’exploitation et la maîtrise des risques routiers et ferroviaires tout en limitant leurs déplacements sur site à proximité des lignes exploitées. Cet outil a été développé par le Cerema et, plus spécifiquement, le CECP d’Angers et les laboratoires de Strasbourg et de Lyon. Une solution Diatram-Stéréo, permettant une mesure 3D à partir des images collectées, est en cours de finalisation.
ATELIERS
Les ateliers s’intéressent à des sujets en construction ou prospectifs afin d’informer les participants aux JTR et d’obtenir leurs avis et leurs suggestions.
Adaptabilité des infrastructures à différents usages
Animateurs : D. Zambon (Idrrim), P. Rossigny (Cerema), P. Porru (Idrrim)
En mars 2019, l’Atec ITS France, l’Idrrim, l’Ifsttar, Routes de France et TDIE publiaient l’étude MIRE14 « Impact de la révolution des usages de la mobilité sur les infrastructures routières et leurs équipements », analyse de l’état des démarches prospectives portées par les différents groupes d’acteurs qui préparent la mobilité routière de demain.
S’inscrivant dans la continuité de cette publication, cet atelier visait à illustrer les enjeux de l’adaptabilité des infrastructures à différents usages, par la présentation de projets opérationnels et le retour d’expériences d’acteurs engagés dans des projets d’expérimentation. Il a également contribué à identifier les leviers d’action et de développement de ces projets innovants, notamment au regard du besoin de capitalisation et de construction d’une doctrine partagée.
Après une introduction qui a rappelé le contexte et les questionnements dans lequel s’inscrit cet atelier, celui-ci s’est structuré en trois parties consacrées à chacun des thèmes développés par l’étude MIRE.
Étude MIRE
David Zambon (Idrrim) a rappelé la méthode de travail et les objectifs visés par l’étude MIRE. Il s’est également attardé sur quelques enseignements issus de cette étude prospective :
- la nécessité d’un travail collectif, dans la durée ;
- le besoin de poursuivre, encourager et amplifier les expérimentations, en travaillant collectivement sur le partage des enseignements qui en seront issus ;
- les nombreuses incertitudes restantes, sur le rôle de l’infrastructure dans la régulation des nouvelles mobilités et son évolution pour s’adapter aux usages comme aux modes d’exploitation.
Infrastructure connectée et mobilité autonome
Pour développer ce thème, Christophe Cella (Vedecom) a présenté le retour d’expérience issu du projet Paris-Saclay Autonomous Lab, qui vise à créer un parcours de 8 km en milieu urbain pour une navette autonome. Pour assurer la communication entre le véhicule et l’infrastructure et permettre la circulation du véhicule en toute sécurité, de très nombreux équipements (caméras vidéo et thermiques, lidars...) ont été installés sur l’infrastructure.
En réponse à ce retour d’expérience, Patrick Porru (Idrrim), s’appuyant sur les documents de Nicolas Hautière (UGE), absent, a illustré, par quelques exemples, les choix technologiques qui se posent pour développer le véhicule autonome, rappelant la nécessité d’une dimension optimale des infrastructures pour éviter un surinvestissement.
Infrastructure énergétique
Ce thème a été illustré par trois présentations complémentaires de représentants d’entreprises sur des procédés de production d’énergie par l’infrastructure :
- la production d’énergie solaire par l’infrastructure, avec le retour d’expérience de la technologie Wattway15, par Cédric Leroux (Colas) ;
- la production et le stockage de chaleur géothermique par l’infrastructure, utilisée pour le chauffage de bâtiment ou le déverglaçage de route, avec le retour d’expérience de Power Road16, par Bertrand Pouteau (Eurovia) ;
- un exemple de chauffage de bâtiment par échange de chaleur utilisant l’infrastructure, avec une présentation de Simon Pouget (Eiffage) d’une expérimentation réalisée en 2013.
Infrastructure numérique
Ce thème a principalement été abordé sous l’angle du BIM dans les infrastructures.
Florence Comes (DIR Île-de-France (Dirif)) a rendu compte du projet engagé par la Dirif sur l’échangeur Pleyel à Saint-Denis, projet réalisé en BIM avec l’appui du Cerema (photo 6). Si le projet, toujours en cours, ne permet pas encore de capitaliser sur des résultats définitifs, ce retour d’expérience a illustré, du point de vue d’un exploitant routier, tous les avantages attendus par cette technologie (en matière de qualité des données, d’échange avec les multiples intervenants du projet ou de concertation avec les riverains et usagers) et les difficultés actuellement rencontrées dans son développement.
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En complément, Pauline Gauthier (Cerema) a présenté l’état d’avancement des travaux de rédaction de doctrine sur le sujet du BIM et les travaux de normalisation en cours au niveau international pour définir des formats de données interopérables.
Nouveaux concepts d’évaluation et de maintenance des infrastructures routières
Animateurs : B. Jacob (UGE), H. Guiraud (Cerema), C. Leroy (Routes de France)
Les gestionnaires d’infrastructures routières sont confrontés à des défis prégnants pour maintenir un réseau, des ouvrages et des routes sûrs et avec un bon niveau de service, dans un contexte économique et environnemental de plus en plus contraint. Ces infrastructures vieillissantes présentent des risques accrus de défaillances, notamment sous sollicitations élevées, dues par exemple à des charges ou un volume de trafic croissants.
De nouveaux concepts et méthodologies contribuent à une évaluation plus précise de l’état des infrastructures et des risques de défaillances, tenant compte des aléas liés au vieillissement des matériaux et à l’évolution des actions climatiques et d’exploitation. Les approches probabilistes et fiabilistes fondent les codes de calculs semi-probabilistes (par exemple : Eurocodes) et fournissent des indices de fiabilité utiles pour un dimensionnement ou une évaluation précis de structures avec des niveaux de risques maîtrisés, pour des états limites ou ultimes de service.
Dimitri Daucher, chercheur à l’université Gustave Eiffel (UGE), a présenté un aperçu de ces méthodes et de leur application à la maintenance des chaussées et à la sécurité routière par l’étude probabiliste des trajectoires des véhicules. Jean-Michel Piau (UGE) a quant à lui précisé leur mise en œuvre pour l’évaluation de l’endommagement des chaussées, en fatigue notamment. L’approche PBS (Performance Based Standards ou normes performancielles) consiste à autoriser certains dépassements des valeurs limites de poids et dimensions des véhicules, sous réserve que ceux-ci vérifient une série de critères de performances : stabilité, freinage et manœuvrabilité et agressivité. Grâce à cette approche, certaines innovations augmentent l’efficacité énergétique (ou autre) des poids lourds, sans effet négatif. Complétée par des politiques d’accès intelligentes IAP (Intelligent Access Program) ou SIAP (Smart Infrastructure Access Policy), elle permet à des véhicules certifiés de circuler sur tout ou partie du réseau routier, sous d’éventuelles conditions. Une meilleure adéquation des véhicules et du trafic aux infrastructures – les durées de vie de chacun étant très différentes – concourt ainsi à une politique de développement durable et à l’atteinte d’optimums économiques en conditions de sécurité.
Bernard Jacob (vice-président Recherche de l’UGE) a présenté les principes des PBS et IAP/SIAP, leurs avantages, leur mise en œuvre dans les pays qui les ont développés. Il a également esquissé les perspectives offertes avec des véhicules et infrastructures connectés pour la préservation du patrimoine routier.
Puis, Pierre Hornych (UGE) a rendu compte des résultats du projet européen Falcon (Flexible & Aerodynamic truck for Low CONsumption), dont l’objectif est de développer un convoi poids lourd économe en carburant. Il a également indiqué comment ces différentes approches pourraient s’appliquer pour une gestion optimale du réseau routier.
Cet atelier s’est poursuivi par une table ronde à laquelle ont participé les différents orateurs, ainsi que Didier Colin (DGITM/DIT), Thierry Goger (FEHRL), Hervé Guiraud (Cerema), Patrick Lerat (Vinci Concessions), Christine Leroy (Routes de France), Stéphane Levesque (URF) et Claude Rospars (Irex). La discussion autour de la table ronde et avec la salle a été animée, avec des questions et réactions très pertinentes de la part des gestionnaires autoroutiers, des experts des infrastructures, et des représentants de Routes de France et de l’URF pour les aspects véhicules.
Le concours « Meilleurs posters de doctorants », sponsorisé par Routes de France, s’adresse aux doctorants du secteur public et privé, dont le sujet de thèse a un lien avec la mobilité des biens et des personnes et les infrastructures terrestres de transport (routes, aéroports, ferroviaire, plates-formes industrielles).
À l’occasion des JTR, le jury, constitué de membres de l’UGE, du Cerema, de l’Idrrim et de Routes de France, a évalué les posters sur des critères tels que la qualité de la démarche scientifique et des résultats, l’apport des travaux dans le domaine des infrastructures et de la mobilité, la qualité de la présentation orale et de la mise en forme du poster.
Les JTR offrent ainsi l’opportunité à ces futurs jeunes professionnels de faire connaître leurs travaux et de dialoguer avec des membres de la communauté scientifique et technique du domaine des infrastructures terrestres de transport.
Le concours 2020 a rassemblé une quinzaine de participants avec des contributions sur des thèmes variés, comme lors des éditions précédentes. Tous les posters sont disponibles sur le site web des JTR. Les lauréats sont :
• 1er prix : Rodrigo Shigeiro Siroma de l’UGE (MAST LAMES) – « Méthodes expérimentales et théoriques de détermination de la durée de vie résiduelle d’une chaussée à partir de l’analyse des bitumes extraits ».
• 2e prix : Mickaël Le Vern de l’UGE (GERS GMG) – « Étude expérimentale des mécanismes et des conditions d’envol des poussières. Application aux chantiers de terrassement ».
• 3e prix:Marie LePivert de l’UGE (ESYCOM) – « Développement de surface dépolluante à base de nanostructures de ZnO pour la purification de l’air par effet photo-catalytique sous lumière UV et visible ».
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CONCLUSION
Les Journées techniques Route rencontrent un succès toujours renouvelé. Avec plus de 400 participants, les JTR 2020 prouvent une fois de plus que la formule satisfait un grand nombre d’acteurs. Son modèle s’appuie sur le partage d’expériences et d’expérimentations entre techniciens de la communauté routière aussi bien publique que privée.
Les sessions de 2020 ont abordé des sujets assez traditionnels, comme les aménagements pour la sécurité routière, les produits bitumineux ou l’endommagement des chaussées, des sujets en cours d’évolution, comme les infrastructures pour transports guidés ou l’adaptabilité des infrastructures, et des nouveaux concepts comme l’évaluation et la maintenance des infrastructures. La 3e édition du concours des doctorants a encore été l’occasion de nombreux échanges sur les travaux de recherche présentés.
Vous retrouverez sur le site des JTR toutes les présentations relatives à la session 2020, aux sessions précédentes et les informations quant à l’organisation de la session 2021, qui se déroulera les 10 et 11 février 2021 à Nantes. Nous vous y attendons.
RÉFÉRENCES
- 10 ans de l’Idrrim en images : www.youtube.com/watch?v=9kLadiM13Xg&feature=youtu.be.
- Feuille de route 2019-2025 de l’Idrrim : www.idrrim.com/actualites-presse/2019-06-17,6802.htm.
- Catalogue des publications Idrrim : https://www.idrrim.com/ressources/documents/10/7282-IDRRIM_catalogue_publications.pdf.
- Rapport ONR 2019 : www.idrrim.com/ONR/.
- D. Zambon, P. Porru, T. Hirel « Observatoire national de la route - Les résultats 2019 », RGRA n° 969, janvier 2020.
- www.congres-idrrim.com.
- E. Gennesseaux, T. Sedran, M. Hardy, « Matériaux granulaires traités aux LH : évaluation de l’excavabilité à la pioche », RGRA n° 949, octobre 2017.
- P. Hornych, L.-A. George, S. Wasner, J.-M. Simonin, « Auscultation des chaussées – Projet national DVDC », RGRA n° 934, février 2016.
- B. Delaporte, J.-P. Marchand, A. Dony, « Projet national DVDC – État d’avancement », RGRA n° 949, octobre 2017.
- C. Petit, E. Manyo, P. Reynaud, F. Allou, B. Picoux, T. Chaise, D. Nélias, J. Maignol, « Projet national DVDC – Conception des couches de surface et méthodes de mesure in situ », RGRA n° 952, février-mars 2018.
- D. Desmoulin, C. Leroy, S. Pouget, B. Delaporte, « Projet national DVDC – Premiers résultats », RGRA n° 963, mai 2019.
- E. Godard, C. Chazallon, P. Hornych, M.L. Nguyen, D. Doligez, H. Pelletier, « Pour une solution durable du renforcement des infrastructures par grilles en fibre de verre », RGRA n° 949, octobre 2017.
- E. Godard, C. Chazallon, P. Hornych, M.L. Nguyen, D. Doligez, H. Pelletier, M. Dauvergne, L. Lumière, L. Brissaud, « Pour une solution durable du renforcement des infrastructures par grilles en fibre de verre », RGRA n° 967, octobre 2019.
- https://www.idrrim.com/ressources/publications/1/6606-Etude-MIRE_VF_BD.pdf
- S. Chaumont, O. Job « Wattway by Colas : alimenter des équipements électriques à proximité de la voirie », RGRA n° 967, octobre 2019.
- S. Vergne, B. Pouteau, O. Baumann, « Power Road : la route à énergie positive accélère son développement », RGRA n° 967, octobre 2019.