Lors du Congrès de l’Idrrim ont été dévoilés les lauréats du prix Infrastructures pour la mobilité, la biodiversité et le paysage (IMBP), organisé tous les deux ans par l’Idrrim et l’ensemble des signataires de la Convention d’engagement volontaire depuis 2010.
Le prix IMBP récompense les meilleures initiatives prises par les acteurs impliqués à différents niveaux de projets de requalification et d’exploitation des infrastructures de mobilité (routes, rues, voies vertes, espaces publics urbains, voies ferrées et fluviales, ports et aéroports). Ces actions doivent œuvrer en faveur de la préservation, de la restauration et de la valorisation des écosystèmes de la biodiversité et du paysage.
Les lauréats 2024 ont été désignés par un jury de dix membres présidé par Thierry Boisseaux, inspecteur général de l'administration du développement durable à l’IGEDD. À l’appui d’analyses des dossiers réalisées par le Cerema, le jury, composé de représentants des secteurs publics et privés dans le domaine des infrastructures et de l’aménagement ainsi que de médias partenaires du prix (RGRA et Le Moniteur), a distingué quatre projets.
Grand Prix : « Renaturation d’un ancien délaissé routier sur la commune de Rougé »
Dans le cadre de ce projet, le conseil départemental de Loire-Atlantique a mis en œuvre une politique de renaturation de délaissés routiers (photos 1). Cette politique s’inscrit dans celle, plus globale, du zéro artificialisation nette (ZAN) portée par la collectivité, qui se traduit notamment par l’abandon de plusieurs projets routiers neufs.
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L’opération de renaturation du délaissé routier sur la commune de Rougé est le fruit d’une expérimentation, mise en œuvre en lien étroit avec le Cerema (direction territoriale Ouest), assistant à maître d’ouvrage sur ce projet. Ce délaissé est, comme beaucoup d’autres, issu d’une rectification de virage. Les espaces de part et d’autre de la nouvelle route sont devenus, par opportunité et au fil du temps, des aires d’arrêt le plus souvent sous-utilisées. Ce seul usage ne pouvant justifier ni le maintien de ces surfaces imperméabilisées, ni les fonctionnalités écologiques que ce délaissé peut générer, le département a fait le choix de reconsidérer ces espaces afin d’y favoriser la biodiversité.
La renaturation du site de Rougé a ainsi fait l’objet des travaux suivants :
- retrait des tables de pique-nique et poubelles ;
- déconstruction de la majeure partie de la chaussée : recyclage des couches non polluées, rabotage et export de la couche d’enrobé polluée aux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) ;
- maintien de l’empierrement et apport de terre végétale ;
- désimperméabilisation et décompactage des accès riverains ;
- création d’une mare au point le plus bas ;
- plantations d’une trentaine d’arbres ;
- fermeture des accès au site (sauf riverains) ;
- coupes de certains arbres, les résidus de coupes étant utilisés pour mettre en place un andain.
Des suivis faune/ flore sont prévus pour mesurer l’évolution en la matière ainsi que la reprise du milieu.
Mention spéciale Continuité écologique : « Un pont à écureuils »
Afin de réduire l’effet de fragmentation que constituent les infrastructures routières pour la faune sauvage, le conseil départemental de l’Hérault a engagé une démarche de restauration des corridors écologiques à travers un plan « Routes et Biodiversité », qui améliore la remontée des signalements de mortalité, de prioriser les secteurs à enjeux et de concevoir des dispositifs adaptés aux contraintes.
Dans ce cadre, le CD 34 a installé sept écuroducs sur différentes routes départementales (photo 2), dont un écuroduc araignée. Par ailleurs, un prototype d’écuroduc tunnel est en phase de test à la Salvetat-sur-Agout et, en 2024, un écuroduc sur poteau sera mis en œuvre pour permettre des installations là où les arbres porteurs ne sont pas suffisamment sécurisés.
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Mention spéciale Paysage urbain : « Entrée de l’hyper centre-ville du Mans »
Du fait de sa situation en entrée de l’hypercentre du Mans, le vaste quartier situé sous les remparts de la cité Plantagenêt a été envahi par un trafic de transit. Le Mans Métropole a souhaité repenser les espaces publics en redéfinissant le plan de circulation des principales rues de ce quartier et en fixant une circulation à 30 km/h sur tous les axes réaménagés.
L’agence d’architecte paysagiste L’Anton et Associés a accompagné la collectivité dans ces transformations. Une concertation a été menée avec les riverains par le biais d’ateliers de travail et de co-élaboration en 2018 et 2019.
Le projet a permis de créer des espaces publics conviviaux en s'appuyant sur l'aspect patrimonial du quartier. Sur deux places majeures, une avenue, deux boulevards et plusieurs rues, l'installation de circulations douces confortables, la prise en compte des manifestations et des usages temporaires, la création d’une forte présence de nature en ville et la réorganisation des stationnements nécessaires aux riverains et aux usages des commerces ont métamorphosé son image. Grâce à des noues urbaines, un square en eau et un système de collecte et de réinfiltration des eaux pluviales, une végétation abondante et dynamique a pu être mise en place et des îlots de fraicheur ont été créés (photo 3).
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L’aménagement a été livré entre 2022 et 2024 sur plusieurs opérations, avec un phasage contraint pour assurer les fonctionnalités urbaines en période de travaux.
Projet prometteur : « Restauration et suivi de fonctionnalité
des continuités écologiques » par SNCF Réseau Occitanie
SNCF Réseau Occitanie a initié en 2018 un programme de restauration des continuités écologiques au sein de ses infrastructures. L’objectif est de réduire le risque de collision des trains avec la faune sauvage, afin de mieux protéger les espèces concernées et d’améliorer la régularité du trafic ferroviaire.
La mise en œuvre de ce programme, planifiée sur plusieurs années, qui repose sur l’usage de technologies de simulation par ordinateur et d’intelligence artificielle, a été confiée à TerrOïko, bureau d’études spécialisé en science des données et développement de logiciels appliqués à la biodiversité.
Après une phase de localisation des « secteurs prioritaires d’intervention » du réseau, c’est-à-dire les zones à plus fort risque de collision, TerrOïko a simulé les dynamiques démographiques et les déplacements de trois espèces (sangliers, chevreuils, cerfs) en sélectionnant cinq tronçons couvrant 500 km de voies, à l’aide de son logiciel SimOïko. Parmi les points chauds étudiés, cinq ont fait l’objet d’études approfondies afin de définir les mesures d’aménagement à mettre en place (figure 1). En parallèle, un outil de mesure et de suivi de l’efficacité de ces aménagements a été développé en lien avec les fédérations de chasseurs.
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L’ensemble du dispositif contribue à la gestion de la biodiversité au sein des emprises ferroviaires et amorce une stratégie de restauration des continuités écologiques. À terme, il sera déployé sur l’ensemble du réseau occitan.